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dimanche 26 novembre 2023

Lumistus de Criamon


 Magister de Scintillus, ce mage déjà très âgé a une certaine propension à l'oubli, notamment en ce qui concerne le relevé du gant de son apprenti. Il est le plus actif des vieux mages de l'Alliance, c'est à lui que sont présentés les très, très rares visiteurs, et que sont confiés les éventuels courriers. Il semble distinguer tout aussi clairement le passé que l'avenir mais sans avoir davantage de prise sur son époque.

Il est obsédé par tout ce qui se rapporte à la Lumière. Naturellement il a longuement étudié l'Art Ignem, ce qui le décida à intégrer la Domus Magnus Flambeau. Mais parvenu aux limites de la magie hermétique, il décida de s'intéresser aux astres.  C'est ainsi qu'il prit attache avec des Mages Maures, en dehors de l'Ordre d'Hermès. Ceci lui vaut une tenace rancune de Vancasitum de Flambeau qui considère cela comme une impardonnable trahison. C'est donc l'un des rares mages de l'Ordre d'Hermès qui connait la magie d'Orient. En particulier, il s'intéresse à l'ancienne et lointaine culture zoroastre.

Il a un autre secret, il entretient une liaison épistolaire avec un Magus de Doïsseteppe (qui a lui même fréquenté les bibliothèques de Cordoue) et le Pontifex de la Rhune. Leur correspondance ne touche qu'à des expérimentations mystiques pour avancer dans la compréhension de l'extraordinaire. Rien qui ne touche de près ou de loin à la politique ni au droit hermétique. Mais Lumistus ne croit pas Vancasitum capable de le comprendre, et ne préfère pas risquer davantage son ardent courroux, c'est pourquoi il garde tout cela secret.

Bien en chair et doté de joues bouffies par la graisse et les années, il affiche sur le visage des imbrications de figures anguleuses et symétriques lui conférant un air austère, mystérieux et même hypnotique. Lumistus porte une longue robe noire constellée de petits cristaux. Il s'agit d'une reproduction de la voûte céleste par une nuit de solstice d'été. Il arbore un pectoral solaire en or repoussé finement ouvragé sur lequel on peut encore deviner une inscription "Sol invictus". Il porte au poignet gauche un bracelet constitué de pyrite et autres cristaux aux formes parfaitement géométriques : cube, pavé, tétraèdre, prisme, cône, pyramide, décaèdre, dodécaèdre. Il garde toujours avec lui l'une des outres chaude pour se soulager de ses rhumatismes.

Son familier est une ourse à présent édentée, surnommée affectueusement "casserole". Sa vigueur exceptionnelle confère à Lumistus une grande longévité. Elle est également dotée d'un féroce appétit. En particulier elle apprécie le miel et les nymphes du jardin d'Astella qui exècre cette gloutonne. L'absence totale de sanction de la part de son maître interroge Astella. Se pourrait-il qu'il bénéficie d'une manière ou d'une autre de ses exactions Alimentaires ? Selon certains Magi, le virtus Creo ainsi ingéré pourrait se répercuter sur l'espérance de vie de Lumistus au travers de leur corde de bronze.

Son sanctum se trouve au sommet de la tour orientale de Val Negra. Selon Vancasitum, ce serait pour être le premier à voir l'astre du jour apparaitre derrière l'horizon. En réalité c'est pour mieux observer les étoiles à l'aide de ses longues vues d'astronome qu'il a fait confectionner par des savants Maures. Heureusement que nul n'a l'occasion d'y pénétrer et de rapporter cela à ses détracteurs. Ayant passé des milliers de nuit à observer les astres, Lumistus est devenu un astronome confirmé. Il cherche à prouver que l'astrologie est fondée, et à déceler dans les constellations des signes du passé et de l'avenir. A la grande surprise de nombre de ses pairs, il y parvient assez régulièrement, ce qui dépasse l'entendement hermétique, et intrigue ses comparses en Criamon. Peut-être aurait-il percé l'Enigme ?

Lumistus de Criamon considère le manque de discernement de Nihil, le familier serpent d'Ignatius de Flambeau, comme un véritable danger pour l'Alliance. Il a demandé à plusieurs reprises au Magorum Concilio de "trancher" définitivement la question.

Lorsque des nouveaux arrivants s'intègrent à l'Alliance au printemps 1174, Lumistus ne peut pas s'empêcher de manifester le grand intérêt qu'il a pour Samir-l'érudit, au grand damne de Vancasitum de Flambeau.

Voici des extrait de ses écrits : 

"Les questions de rapports et de proportions entre grandeurs traversent l’œuvre de Platon qui arrime l’univers de part en part, au moyen de ces mathématiques naissantes. D’une part, la fabrication de l’Âme du monde s’explique à partir de trois types de médiétés (arithmétique, géométrique et harmonique) : l’Âme du monde rend compte des mouvements des corps célestes et permet une description mathématique du changement dans le domaine astronomique. Constituée comme une sphère armillaire, elle est formée de deux bandes longitudinales recourbées, le Même et l’Autre. La Bande de l’Autre présente une division en 7 nombres, où des médiétés harmoniques et arithmétiques font apparaître les principaux intervalles musicaux : octave (2/1), quinte (3/2), quarte (3/4) et ton (9/8). D’autre part, le corps du monde, disposé en quatre couches concentriques, à l’intérieur de la sphère armillaire de l’Âme du monde, se compose de quatre éléments (eau, terre, air, feu) associés à quatre polyèdres réguliers : tétraèdre, octaèdre, icosaèdre, et cube, assurant leur fondement incorruptible : le monde des choses dans sa mutabilité se réduit à une structure immuable, deux types de triangles rectangles. Platon envisage ainsi les surfaces et non les volumes de ces figures."

"Post haec igitur tempus est ut expediamus nunc quiddam nimis utile in platonica quadam disputatione, quae in Timaei cosmopoeia haud facili cuiquam uel penetrabili ratione uersatur. Omnes enim planae figurae, quae nulla altitudine crescunt, una tantum medietate geometrica continuantur ; alia quae iungat non potest inueniri ; unde duo tantum in his interualla sunt constituta, a primo scilicet ad medium et a medio ad tertium."

« Après cela, il est temps d’exposer quelque chose de bien utile à l’étude de Platon, dont le système, dans la cosmogonie du Timée, est loin d’être facile et d’accès aisé. Toutes les figures planes, qui n’ont pas de hauteur, sont reliées par une seule médiété géométrique ; on ne peut trouver une autre médiété qui les joigne ; d’où il suit qu’il y a seulement deux intervalles dans ce cas, du premier terme au moyen et du moyen au troisième ».

Restat ergo de maxima perfectaque armonia disserere, quae tribus interuallis constituta magnam uim obtinet in musici modulaminis temperamentis et in speculatione naturalium quaestionum. Etenim perfectius huiusmodi medietate nihil poterit inueniri, quae tribus interuallis producta perfectissimi corporis naturam substantiamque sortita est. Hoc enim modo cybum quoque trina dimensione crassatum plenam armoniam esse demonstrauimus. 

« Il reste à parler de l’harmonie suprême et parfaite, celle qui, étendue en trois dimensions, joue un grand rôle dans les combinaisons de l’harmonie musicale et dans l’étude des questions de la nature. En effet, on ne saurait trouver plus parfait que cette sorte de médiété qui, se déployant en trois dimensions, possède la nature et la substance du corps le plus parfait. Car c’est de cette manière, comme nous l’avons montré, que le cube, lui aussi, solide à trois dimensions, est la plénitude de l’harmonie ».

Tu numeris elementa ligas, ut frigora flammis, arida conueniant liquidis, ne purior ignis euolet aut mersas deducant pondera terras.

 « Tu lies les éléments par les nombres, de sorte que le froid et la  flamme, le sec et l’humide soient en harmonie, que le feu, plus pur, ne s’envole pas ou que la terre ne croule pas sous l’effet de son poids. »

Ares Graece uirtus interpretatur Latine, rithmus numerus ; inde arithmetica uirtus numeri dicitur. Virtus autem numeri est quod ad eius similitudinem cuncta formata sunt

« En latin, le mot grec arès se traduit par ‘vertu’ et rithmus par nombre. Arithmétique veut donc dire ‘vertu du nombre. La vertu du nombre réside dans le fait que tout a été formé à sa ressemblance. » 

Multitudinem ergo que per se est arithmetica speculatur, illam autem que ad aliquid est, musica. Immobilis magnitudinis geometria pollicetur notitiam. Mobilis uero scientiam astronomice discipline peritia uindicat. Mathematica igitur diuiditur in arithmeticam, musicam, geometriam, astronomiam. 

« L’arithmétique considère la multiplicité absolue, la musique, la multiplicité relative. La géométrie propose la connaissance de la grandeur immobile ; la compétence, que l’astronomie revendique, est la science de la grandeur mobile. La mathématique se divise donc en arithmétique, musique, géométrie, astronomie ».

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