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vendredi 13 octobre 2017

Trente-cinquième chapitre: Du dernier diadème égaré sur un champ de bataille anglois

Les chroniques de la Nouvelle-Calebaïs

Du dernier diadème égaré sur un champ de batailles anglois

Orion de Verditius avait affirmé lors du précédent Conseil des Magi que le dernier diadème de Quindalon se trouvait à l’ouest de l’Alliance, vers la cité d’Auch. Il avait même fait sculpter en haut du puits une carte d’orientation en pierre de la région, afin de faciliter l’utilisation de ses pouvoirs de localisation. Gilles de Jerbiton, conscient de l’importance de l’activation de la Cloche d’Ybyn, ramena une troupe de soldats vétérans de sa famille pour l’escorter. Mélisandre de Merinita et Picard d’Ex-Miscellanea, accompagnés par leur servant respectif, décidèrent de l’accompagner.

C’est le début de l’été 1170, et les Magi décident de se faire passer pour des mercenaires et des marchands, afin de tromper les patrouilles anglaises. Passant par Tarascon, ils récupèrent trois chariots et des marchandises, dont une partie sera livrée à Foix, ainsi que des provisions pour un long voyage. La Troupe décide de prendre plein Nord, au cœur de la forêt mais en évitant les terres occupées par les anglois. Mal leur en prit car une poignée d’archers vêtus de casaques de cuir bouilli leur tendent une embuscade, rapidement déjouée par l’efficacité des soldats de Mirepoix et les sortilèges des Magi.

Craignant un piège, Dame Mélisandre, toujours aussi clairvoyante, se transforma en oiseau pour survoler la forêt tandis que le reste de la Troupe découvrait dans un fossé un soldat du Comte de Toulouse, gravement blessé. Figé dans la glace par les soins de Maître Picard, afin qu’il ne trépasse pas, jusqu’au retour de ma fantasque maîtresse, il subit les pouvoirs mentaux de Gilles de Jerbiton. Il s’agissait d’une ordonnance au service du Comte de Toulouse, qui transportait un message de la plus haute importance à son allié le Comte de Foix. Raymond VI joue actuellement son va-tout et demande l’aide immédiate de son vassal pour bouter l’anglais hors de ses terres définitivement avant la fin de la prochaine lune.

Pendant ce temps Dame Mélisandre joue avec l’esprit d’une vingtaine de forestiers inquiets de ne pas voir revenir leurs éclaireurs. Un par un ils tombent endormis, ligotés ou s’effondrent la bave aux lèvres, l’esprit brisé. La Troupe met ainsi la main sur plus d’une vingtaine d’armures de cuir qui viennent à merveille compléter leur déguisement de soudards. Un des hommes de Gilles est alors envoyé en toute hâte prévenir le Comte de Foix et l’informer que de la soldatesque au service de Comminges pourrait se retrouver sur leurs arrières.

Après une brève halte à Pamiers, et une nouvelle journée de marche, la troupe parvient à rejoindre Muret, au Sud de Toulouse. Tout au long de cette épuisante étape, une forêt féerique semble les narguer. Dame Mélisandre ne peut s’empêcher d’y pénétrer, inquiétant ses compagnons. Elle racontera en les rejoignant le lendemain qu’elle n’a fait que danser et courir avec d’accortes fées luminescentes. Gilles de Jerbiton refuse lui de passer la nuit dans la forêt et poursuivit avec ses hommes vers la cité fortifiée. De très nombreux gardes parcourent les remparts et il doit justifier de son arrivée à cette heure tardive dans une véritable ville forteresse. Invité au château, il préfère se rendre dans une auberge pour se délasser quelques heures.

Le lendemain il est reçu par le Vicomte Gonzagues de Muret. La cinquantaine, militaire trapu, il est vêtu de sa lourde cotte de mailles même en cette chaude journée et à l’abri du donjon. Ils discutent de la venue du Comte de Foix et de ses troupes, Gilles de Jerbiton se voulant rassurant. Tandis que les deux autres Magi rejoignent la cité, ils se rendent compte assez facilement que soldats comme civils manquent cruellement de vivres. Alors que Mélisandre de Merinita distribue quelques miches de pain, s’attirant les hourras des pauvres hères, elle se fait conduire auprès du Vicomte, prenant l’apparence d’une noble dame comme à son habitude en pareille situation. Elle le séduit sans aucun mal et, avec l’aide de Gilles, lui fait signer un accord commercial entre Tarascon et Muret pour approvisionner la cité en nourriture, notamment en riz de Camargue.

Le lendemain la campagne entourant la route vers Toulouse est riche de nombreux vergers, de villages opulents et de clochers s’élançant arrogamment vers les cieux. Décidant d’éviter la capitale du Comté ils bifurquent vers Auch et il ne faut que quelques heures pour distinguer les premiers signes de dévastation : villages déserts, églises en ruine, champs en jachère... Gilles de Jerbiton fait prendre des notes à ses hommes pour aider la future armée de Foix.

Arrivé à un village quelque peu épargné par la guerre, Picard d'Ex Miscellanea fouille une maison un peu à l'écart et y découvre de nombreuses plantes séchées médicinales et de nombreuses potions. Dame Mélisandre prend alors une forme de corbeau pour éviter toute mauvaise rencontre et ne voit que dévastation et malheur à perte de vue. Alors qu'elle plane en silence, elle a une vision de tous ses compagnons morts, atrocement mutilés, et elle revient vers le village à tire d'aile.

Picard d'Ex-Miscellanea se fait pendant ce temps agresser sur la place d'une village ; un membre crochu, écailleux, jaillit du puits qu'il observait avec attention pour l'empaler. Surpris, il se jette en arrière et congèle la créature. Il n'a pas le temps de prévenir ses compagnons qu'un cri strident d'une puissance phénoménale retentit pendant de longues secondes. Ma maîtresse, à l'aide de sa double vue, voit des dizaines d'araignées démoniaques à l'apparence grotesque s'attaquer aux hommes d'armes de la Troupe. S'en se soucier de sa sécurité, elle se rue au milieu des guerriers et dresse un sortilège de protection contre les animaux fabuleux. Malheureusement, il s'agit de créatures démoniaques. De plus en plus nombreuses, elles terrifient les soldats qui détaillent ces monstres à moitié reptiliens. Tandis que Gilles de Jerbiton s'emploie à faire léviter un maximum des Vulgaires pour les protéger, les deux autres Magi déchaînent la plupart de leurs plus puissants sortilèges pour stopper la masse cauchemardesque.

Dame Mélisandre, toujours aussi intelligente et machiavélique, crée l'illusion d'une araignée d'une taille titanesque et arrive à prendre le commandement des créatures plus petites, les lançant dans la direction de l'armée angloise située à quelques lieues de là vers l'Ouest. Elle voyage une bonne partie de la nuit et c'est une heure avant l'aube qu'elle laisse l'illusion s'éteindre quand les premiers démons se jettent sur les sentinelles angloises.

De leur côté, Picard d'Ex-Miscellanea et Gilles de Jerbiton continuent à fouiller le village après avoir rassuré à grands coups de magie les hommes d'armes. Ils découvrent un souterrain qui semble interminable, et pénètre peu à peu dans un Regio. Le sous-sol est empli de galeries démoniaques suintantes de sang. En vérifiant le puits, ils décident de ne prendre aucun risque et bloque l'entrée avec une poignée de stalactites avant de laisser tomber une torche enflammée à l'intérieur. Aussitôt, une immense gerbe de feu surgit du puits et grimpe à plusieurs mètres de haut. Ils continuent à faire des expériences avec du charbon, de l'eau, du sang mais le phénomène ne se reproduit pas.

Les soldats ne restent pas inactifs, et bouchent peu à peu le puits qui semble être l'entrée principale du Regio avec des rochers pour finir avec des objets religieux qu'ils ont pillé dans l'église. Le sol se met à trembler, les maisons s'effondrent, le puits pourtant fermé se met à fumer, et un nuage opaque se forme au-dessus du village.

De son côté Dame Mélisandre poursuit sa mission et divise les araignées en deux vagues par d'habiles sorts d'illusion. L'une d'entre elle disparaît avant de pouvoir agir en se jetant à l'assaut d'un petit village occupé proche du camp anglois lorsque les cloches de l'église se mettent à sonner. Les autres démons se jettent sur les tentes et commencent un massacre que ma maîtresse n'aura de cesse d'oublier dans les années à venir. Plus d'un millier d'âmes périrent en cette sombre nuit avant que la dernière araignée ne soit anéantie, et les corps brûlés sur ordre des officiers anglois accompagnés d'un prêtre.

Mélisandre de Merinita part se cacher dans une forêt sombre et s'abandonne dans un profond sommeil qui lui permet de récupérer de cette nuit interminable. Ses rêves sont souvent prophétiques aussi parait-il important de les rapporter ici:

"J'ai vu un pêcheur sur un bateau, son filet chargé de poissons. Un des poissons semble me fixer et meurt peu à peu d’asphyxie. Je me sens peu à peu manquer d'air également. Je me réveille et tombe alors de l'arbre où je dormais. Une grotte m'avale ! Elle a l'apparence de la bouche d'un homme. Je suis dans une assiette, et cette fois je plonge dans la bouche pour descendre au plus profond de son ventre. J'y deviens une petite sirène. Je suis dans le noir. Je sens des présences, des poissons à nouveau. Ils meurent et remontent vers la surface. Je tourne en rond les yeux fermés puis fonce dans une direction au hasard. Un mur est devant moi. Je passe à travers grâce à ma magie. Je flotte dans un environnement épais, visqueux, et là je suis réveillé par Gilles."

En effet pendant ce temps Gilles de Jerbiton guidait la Troupe dans la direction prise par l'armée d'araignées et en utilisant quelques sortilèges ils trouvent Dame Mélisandre qui dort d'un sommeil plus qu'agité. D'après les dires d'un témoin elle était réellement tombée de l'arbre ! Ils contournent le bourg occupé par les anglois, L'isle-Jourdain, après avoir chargé ma maîtresse sur un cheval de bât. Peu à peu la Maga retrouve ses esprits alors qu'un terrible vrombissement fait trembler les nuages. Du moins, c'est ce qu'il semble à Dame Mélisandre qui voit dans le ciel une libellule titanesque, luisant d'une lumière aveuglante, se ruer vers eux. Devant l'air hébété de ses compagnons, elle comprend qu'il s'agit d'une nouvelle vision et elle crie à ses compagnons de se mettre au plus vite à l'abri car une créature puissante vient pour les anéantir. 

Picard d'Ex-Miscellanea creuse une forteresse tellurique et surveille le ciel tandis que chevaux et soldats se réfugient sous la surface terrestre. Mélisandre de Merinita dissimule la forteresse sous la plus puissante de ses illusions et les compagnons soufflent un instant. Malheureusement la créature arrive et flotte dans un bourdonnement tonitruant au-dessus de leur abri. Ma maîtresse hurle à tout le monde de combattre le terrifiant insecte avant de s'enfuir sous sa forme corbine. Elle déploie tous ses pouvoirs mais n'arrive pas à semer ce qui la poursuit. Quand elle finit par se résoudre à faire face à son ennemi, elle se retrouve devant une magnifique colombe qui exhale un parfum de divinité insupportable. Perdant le contrôle, elle se rue sur l'oiseau pour lui crever les yeux de ses serres acérées, et une voix retentit dans les nuages, entendu sans nul doute par tout mortel à des lieues à la ronde: "Elle a fait son choix".

La colombe disparaît et Mélisandre se retrouve face à Nathanaël de Tytalus et son épée sainte. Elle croasse de colère et tente de fuir, mais ce dernier rompt tous les sortilèges d'un coup puissant de son épée dans les airs, et la Maga tombe vers le sol sous sa forme humaine. Rattrapée par son ami et néanmoins adversaire en ce jour où le Ciel s'en prit sans raison à cette défenderesse acharnée de l'humanité, elle doit lui raconter tout ce qui s'est passé les heures précédentes. Il ne semble pas croire ce que lui raconte ma maîtresse, pourtant la probité incarnée, et il perd même la tête par moment semblant s'adresser à une personne invisible. Gilles de Jerbiton et le reste de la Troupe arrivent sur ses entrefaites, et se rend compte que la Maga ne dispose plus de sa Parma Magica. Craignant une nouvelle attaque d'un des ennemis de l'Alliance, il pénètre dans l'esprit de Nathanaël de Tytalus et y découvre un ange. Les actions de Dame Mélisandre ont entraîné la mort de centaines de fidèles du Dieu crucifié, et elle doit en payer le prix selon la créature emplumée, malgré les dénégations de la Maga qui tente d'expliquer qu'elle a détruit une armée démoniaque et qu'elle devrait être au contraire récompensée.

L'ange, obtus comme seuls ceux de son espèce savent l'être, reste ferme et explique que la punition pour leur action est d'offrir le repos éternel aux mortels morts pour leur foi. La Troupe revient sur ses pas vers L'isle-Jourdain. Gilles de Jerbiton parlemente à la porte tandis que la magie deux autres mages créent ex-nihilo une croix sur un promontoire et les gardes finissent par aller chercher le prêtre en comprenant qu'un miracle se déroule sous leurs yeux. Le prêtre, protégé par sa foi, perce les mensonges et les illusions des Magi, mais il semble prendre ma maîtresse pour une simple d'esprit touchée par la grâce du Dieu des chrétiens. Il bénit la terre souillée par le combat tandis que Dame Mélisandre remplit le caveau sous la croix avec les cendres du bûcher. Elle en profite pour récupérer le Virtus démoniaque pour l'Alliance. A la demande de Nathanaël de Tytalus, des enfants du village entonnent des chants religieux pour encourager la Maga qui ne peut s'empêcher de se confesser longuement en public. Elle écrit alors que le prêtre lit, lors d'une scène surréaliste où il finit par la bénir également. Maurice, le plus jeune des enfants de chœur, les suit.

Dame Mélisandre le questionne sur le diadème. Il lui répond innocemment que seules les princesses portent ce type de bijoux. Elle l'interroge longuement et il finit par avouer qu'il a vu une jeune femme emmenée au château pendant qu'il nettoyait les écuries. Le seigneur Gonzague lui a fait jurer de garder le silence et il sanglote d'avoir rompu sa promesse. Nathanaël de Tytalus décide de se faufiler jusqu'à la maison fortifiée que Maurice appelle un château pour interroger les marmitons. Malgré ses nombreux talents de bonimenteur, il finit par être arrêté par les gardes qui le conduisent devant le seigneur Gonzague Talbot. Le Magus affirme venir louer les épées de son maître, un capitaine mercenaire. L'anglois paraît dubitatif face à l'histoire toujours plus rocambolesque et défie le Tytalus en duel. Ce dernier perd le duel mais se montre suffisamment compétent et vaillant pour que la Troupe soit engagée pour renforcer les défenses du bourg, lourdement affaiblies après l'attaque démoniaque.

Le lendemain Gonzague Talbot organise une équipée autour d'une lourde carriole blindée. Quinze de ces hommes l'accompagnent en sus des nôtres. Dame Mélisandre profite du voyage pour explorer l'esprit des soldats en évitant soigneusement les passagers du chariot. Elle apprend qu'il abrite le Père Philippe, qu'elle ne connaît que trop bien, et deux jeunes femmes, Carlotta, une des filles du Comte de Toulouse, et Fanny, première camériste. Ils se dirigent vers Auch.

Après avoir prévenu ses compagnons, ma maîtresse prend le contrôle des chevaux et envoie la carriole dans un champs. Des brigands illusoires jaillissent des fourrés, semant le chaos parmi les anglois. Le sergent, sous le contrôle de Gilles de Jerbiton, envoie ses hommes poursuivre les brigands qui fuient vers la forêt. Gonzague de Talbot sort du chariot, l'épée à la main. Il n'a pas le temps d'hurler un ordre que Mélisandre le transforme en porc. Elle part ensuite en chantonnant à la poursuite des anglois pour maintenir ses illusions et perdre les hommes d'armes dans la forêt. Les soldats de Gilles attachent le prêtre, pendant qu'il discute avec les deux femmes. La fille du Comte n'est plus de toute première jeunesse, mais c'est la camériste qui surprend tout le monde. Énorme petite bonne-femme rousse, elle jure comme un charretier avant de s'en prendre physiquement au Magus. Trois gardes sont nécessaires pour la maîtriser et la bâillonner.

La fouille des deux anglois et de la carriole ne donne rien de probant, si ce n'est quelques livres d'Aquitaine, et la Troupe décide de repartir pour l'Isle-Jourdain. Dame Mélisandre revient triomphante avec quelques chevaux, et le voyage dure quelques heures, seulement troublé par les coups de pied dans la porte du chariot de la camériste. La carriole est laissée sous bonne garde à la lisière de la forêt et la Troupe pénètre sous un voile d'invisibilité dans la bourgade. Une fouille silencieuse mais énergique du castelet permet de découvrir une cache dans le plafond de la pièce de réunion. Une paire d'objets magiques côtoient une fortune en livres, en bijoux et des ouvrages divers. Mais surtout les compagnons mettent enfin la main sur le dernier diadème de Quindalon.

Les Magi cessent d'être discrets en quittant la ville, allumant plusieurs foyers d'incendie dans le manoir fortifié. Ils repartent en direction de Toulouse, passant par la zone maudite où sont apparues les araignées démoniaques. Dame Mélisandre jure à qui veut l'entendre que si les anges n'ont pas nettoyé la région après la punition qu'elle a subie, elle se vengera. Mais étrangement elle découvre que les lieux semblent peu à peu exhaler un parfum de magie. L'abandon des terres par les humains et la destruction des forces démoniaques a ramené le territoire à son état originel. Les compagnons subodorent qu'il doit y avoir de nouvelles sources de Virtus, et décident d'y revenir ultérieurement. La Troupe bifurque vers Mirepoix pour remettre au père de Gilles, le Baron, les prisonniers et la fille du Comte afin de limiter l'implication de l'Ordre dans le conflit. La camériste se révèle une cuisinière d'exception, livrant un combat dantesque dans la cuisine du château pour livrer le meilleur cassoulet du monde, sans équivoque !

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